Quels sont les effets du passage à la majorité civile des jeunes incarcérés et comment ceux-ci vivent-ils cette nouvelle situation ? L’INJEP a mené une enquête auprès de ces jeunes femmes et jeunes hommes incarcérés qui atteindront l’âge adulte sous les barreaux. 600 jeunes « fêtent » chaque année leurs 18 ans en prison, un anniversaire qui affecte leurs conditions d’incarcération, leurs droits, leurs liens familiaux ainsi que leur accompagnement éducatif. Pour comprendre quelles sont les conséquences du passage à la majorité des jeunes incarcérés et comment ceux-ci vivent cette situation, l’INJEP a mené une enquête au sein de sept établissements pénitentiaires. Une très grande majorité des mineurs incarcérés sont des garçons, et neuf sur dix ont 16 ou 17 ans. Il ressort de l’enquête que la détention freine le processus d’autonomisation et d’indépendance économique des jeunes vis-à-vis de leurs familles. Le passage à la majorité se traduit par ailleurs par une rupture de la prise en charge éducative dont ils bénéficiaient.
Une autonomisation souvent précoce chez les jeunes incarcérés
La perception et le vécu de l’enfermement varient du reste selon les milieux sociaux, les conditions matérielles d’existence ou encore les trajectoires de vie. De ce point de vue, l’enquête souligne que la période entre l’enfance et l’âge adulte des jeunes incarcérés est relativement courte au regard des expériences plus progressives de la grande majorité des « autres » jeunes. Les parcours des jeunes rencontrés remettent ainsi en question les indicateurs classiques mobilisés pour qualifier le passage à la vie adulte : fin des études, indépendance économique, décohabitation, installation en couple…
Or, la prison pour mineurs réassigne ces jeunes au statut d’enfant tandis qu’ils avaient souvent déjà l’habitude de « [se] débrouiller seuls », d’être sujets de leur propre vie. En effet, à partir du déferrement, voire dès la garde à vue, leurs parents sont réintégrés au processus de suivi institutionnel et les éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) deviennent incontournables.
Un changement de régime carcéral
Le passage en prison pour adulte implique l'arrêt de la prise en charge assurée par la PJJ, et donc la fin du lien avec des éducateurs, des éventuels projets éducatifs commencés, et la diminution du nombre d’activités. La rupture est parfois brutale, et plus encore pour ceux qui sont peu soutenus par leurs familles, d’autant que de nombreux mineurs rencontrés méconnaissent les effets du passage à la majorité civile sur les conditions d’incarcération. Ces jeunes appréhendent par ailleurs la prison pour majeurs comme un lieu où s’exerceraient davantage de violences, en promenade ou en cellule, en raison de l’âge et des peines des autres détenus. |