Notion à la fois floue et médiatisée, l’éco-anxiété est devenue un motif de mobilisation fréquemment avancé par les jeunes activistes pour justifier leur entrée dans « le mouvement climat ». Cette notion interroge les collectifs de lutte contre le changement climatique : l’éco-anxiété doit-elle être traitée sous l’angle du soutien individuel, constitue-t-elle un accélérateur d’engagement ou fait-elle au contraire peser un risque de « dépolitisation » des enjeux climatiques ? Ces interrogations font partie des questions explorées par l’INJEP dans le cadre d’une enquête inédite menée auprès de jeunes activistes du « mouvement climat ». Comment les activistes du mouvement climat appréhendent-ils l’éco-anxiété ? Entre prise en charge des troubles anxieux des militants liés au dérèglement climatique et approche récusant une intervention jugée trop individualisante face à un phénomène aux origines et aux effets fondamentalement collectifs, deux approches s’opposent. C’est l'une des questions abordées par Laurent Lardeux, chargé d’études et de recherche à l’INJEP et auteur de ce numéro d’INJEP analyses & synthèses, qui a interrogé plus de 50 jeunes militants et militantes de ces mouvements, qui sont généralement diplômés, issus de classes sociales supérieures et souvent imprégnés d’une forte culture militante familiale. Individualiser ou socialiser les problèmes ? Parmi la variété des motifs avancés par les jeunes activistes pour justifier leur entrée dans le « mouvement climat », l’éco-anxiété est devenue un facteur central de mobilisation, fait valoir l’auteur, en s’appuyant sur une recherche, menée entre 2021 et 2023, auprès de 12 collectifs répartis dans 17 villes et 11 régions de l’Hexagone.
Dès lors, le soutien psychologique des activistes est considéré par certains acteurs comme un élément de doctrine articulant "culture du soin et changement de système". Il mobilise des groupes de soutien dans un souci de préservation de la santé mentale des activistes ainsi que dans une perspective de soutien individuel et de renforcement du collectif.
Pour autant, d’autres y voient un risque de "dépolitisation" des enjeux climatiques dispensant de prendre en compte les origines structurelles du dérèglement du climat en lien avec les acteurs économiques et politiques au profit d’une approche micro-individuelle. Les orientations militantes qui "individualisent les problèmes au détriment des celles les socialisant " sont contestées au motif que se définir comme éco-anxieux, c’est pour beaucoup, "revendiquer la légitimité des craintes et des angoisses subies". Dans cette optique, l’éco-anxiété est considérée comme un objet de revendication et un moteur de l’action politique afin de remédier collectivement aux origines sociales et environnementales des angoisses subies.
Plus généralement, le rapport « Les jeunes activistes dans le(s) mouvement(s) climat » apporte des éléments de compréhension à la fois sur les conditions d’entrée dans le mouvement, mais aussi sur les craintes et les espoirs que suscitent ce type d’engagement parfois à « haut risque » lorsque certaines actions et orientations se durcissent. Il permet également de saisir, à un niveau plus global, les lignes de force qui structurent ces collectifs qui revendiquent une gouvernance horizontale qui les différencient d’organisations plus traditionnelles. |